Car il était beau , dans le soleil , beau comme un prince , avec ses yeux brillants et son rire éclatant , ce fils de pauvres pêcheurs , dans ses nippes usées.
Le bonheur lui donnait fière mine .
Antonio descendit de cheval .Il resta un moment en compagnie d'Eusebio .Puis il poursuivit sa tournée et s'éloigna en bordure du marais .
C'est ce soir -là que Folco décida de tenter ce qu'il n'avait jamais osé jusque-là : enfourcher Crin-Blanc et se lancer avec lui dans une grande course .
Il choisit un moment oú il était seul dans l'enclos avec son cheval.Alors , il lui parla doucement , le flatta du plat de la maintout le long des reins.
Folco n'avait pas de bride.Une corde ferait l'affaire.Crin-Blanc un peu ombrageux résista d'abord, puis céda et se laissa passer la corde autour des naseaux .
Debout contre l'épaule de son cheval , saisissant la crinière à deux mains , Folco prit son élan , s'enleva , retomba en se faisant aussi léger qu'il pouvait , sur les reins de sa monture .
Surpris , Crin-Blanc se cabra d'un seul coup et fit un écart .Il n'entendait plus la voix de son ami .
C'était un cheval sauvage dont le sang s'affolait parce qu'on essayait de le monter .
Folco eut beau serrer les genoux , se cramponner à la crinière , Crin-Blanc , en deux brusques sauts de mouton , se débarrassa de son cavalier et l'envoya rouler à terre .
Folco se retrouva laface dans la poussière et tout meurtri .Il se releva .
Déjà , Crin-Blanc était loin .Le garçon le vit disparaître au galop, au tournant de la petite pinède .
Fini le beau rêve !....
Folco avait le coeur bien gros .S'il n'avait pas vu arriver son grand-père qui venait d'accoster avec le barquet , le jeune garçon n'aurait pas eu le courage de se contenir .Il aurait éclaté en sanglots .
Et le soir , avant de trouver le sommeil , près du petit frère qui , lui , s'était depuis longtemps endormi, Folco se répétait tout bas :
"Il était mon ami .Il a cru que j'allais lui faire du mal....Il est parti et c'est ma faute...."
- Fin du chapitre 7 -
Chapitre 8 : Crin-Blanc a disparu
Deux longues semaines passèrent sans que Folco eût la chance de rencontrer Crin-Blanc.
Pourtant , chaque jour , le garçon partait sur sa barque et explorait le marais .
Il abordait aux terrains de parcours de la manade .Mais il était difficile d'arriver à bonne distance de la troupe des chevaux sauvages .
Un soir , pourtant , après avoir passé la grande mare , Folco , en longeant la berge découverte , aperçut au loin un groupe de chevaux , à contre-jour .Il amarra son bateau et sauta sur la rive .Puis en rampant dans la prairie et s'aplatissant derrière les touffes de salicornes , il commença son approche .
Pas un buisson qui lui permît de se cacher .Heureusement pour Folco , la plaine était coupée par une roubine , un fossé à sec envahi par les herbes .Le garçon s'y laissa glisser et suivit ce fossé .
Le soleil dorait les robes claires des chevaux .Soudain , ils s'enlevèrent pour un petit temps de galop et se rapprochèrent .
Crin-Blanc aurait dû galoper à la tête de son clan .Folco , qui l'aurait distingué même de très loin , ne reconnut pas la fière silhouette de son ami .
Bien caché au creux de la roubine , Folco observa longuement la troupe .La manade était inquiète .Les chevaux en groupe , presque serrés flanc contre flanc , semblaient pressentir un danger .Ils paissaient , arrachant ici et là une touffe d'herbe .Mais on les sentait impatients , prêts à s'enfuir à la moindre alerte .
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