mardi 1 novembre 2011

Crin-Blanc (charitre 6 suite et fin )

 Folco lui avait raconté une merveilleuse histoire : sa rencontre avec un poulain couleur de neige , le rapt de la jument par les bohémiens .Chaque soir , quand ils s'étendaient tous deux , côte à côte sous leurs couvertures , Folco n'en finissait plus de parler au petiot de son ami Crin-Blanc , le cheval sauvage qu'il allait retrouver au milieu du marais.
  Ce marais , pour le petit qui ne s'éloignait jamais de la cabane , c'était le pays enchanté des génies et des fées .
  "Un jour , je t'emmènerai avec moi , sur mon barquet , disait Folco...Et tu verras...
   "Tu me le promets toujours ...", soupirait l'enfant .
 Il restait seul sur la rive regardant son grand frère partit à l'aventure vers le pays du mystère .Là-bas , Folco avait en secret ses rendez-vous avec un prince blanc qui lui apparaissait tout d'un coup sous la forme d'un immense cheval aux yeux de feu .Un cheval qui parlait , comme les génies parlent dans les contes .
  C'est ainsi que le petit frère de Folco se représentait Crin-Blanc .
  Folco savait très bien raconter de jolies histoires qui font rêver .Mais celle de Crin-Blanc était la plus belle de toutes .
  Et voici que ce soir , le grand frère revenait au mas avec ce personnage de la féerie...C'était un vrai cheval à la robe immaculée .Il était plus grand , plus magnifique encore que le cheval de rêve dont Folco avait raconté l'extraordinaire aventure .
  "N'aie pas peur....dit Folco en riant au petiot qui n'osait pas s'approcher .Tu vois , c'est Crin-Blanc .Il est à moi , maintenant ."
  C'était le conte merveilleux qui continuait .
  "Dis , Folco , dis..."
Folco se pencha à l'oreille du petit et tout bas :
"Oui , Crin-Blanc est à moi .À partit d'aujourd'hui , il est à moi , tu entends ?C'est mon cheval .Le manadier me l'a donné .Je te raconterai .....
   Il te l'a donné ..., ricana le grand-père Eusebuio .Qu'est-ce que j'entends là? Je n'ai plus qu'une oreille de bonne , mais elle me suffit .Alors , c'est à un petit sauvage comme toi que le manadier a fait cadeau d'un de ses chevaux!...
   -Ecoute , grand-père ...
   -Ta...ta   ta..Assez de sornettes!..
   -C'est Crin-Blanc , dit Folco .Et je te le jure , grand-père , je te jure que le manadier me l'a donné .Tout à l'heure , devant tous ses gardians .Antonio te le répétera .
  -C'est bon....Toujours tes histoires de chevaux.Elles finiront bien par te tourner la tête .Je parlerai à Antonio .Et qu'est-ce que tu vas en faire de ton cheval?
  -Je vais le mettre dans l'enclos , dit Folco .Tu veux bien ?
  -Je ne sais plus ce que je veux .Mais ce qui est sûr , c'est que demain tu me feras le plaisir de pousser jusque chez le manadier .Tu iras me chercher Antonio.J'ai à parler à ce vieux fou .
  -Merci , grand-père , merci!..."cria Folco .
Et il entraîna le petit frère encore tout éberlué vers l'enclos oú, docilement , Crin-Blanc les suivit .
  -"Je vais l'installer ici , dit Folco .Hein , Crin-Blanc , tu seras bien...et soigné , et pansé .Tu verras".
Le cheval restait encore un peu craintif .
  -"Il faut qu'il s'habitue , dit Folco au petit .Tu vois , il mange dans ma main .Donne -lui une poignée de paille , toi aussi.N'aie pas peur .Il te sent parce qu'il ne te connaît pas .Là , je le tiens par sa mèche blanche .Tu peux lui caresser la joue....Attention!...
  -Il a peur de moi , dit le petit .
  -Non .Il prend le vent .Va vite fermer la barrière " .
Folco avait tout de suyite deviné la cause de cette impatience qui faisait frémir son ami .Très loin , car on entendait à peine leurs hennissements , la troupe des chevaux  sauvages  galopait vers le fleuve .
Crein-Blanc laissa tomber la poignée de foin qu'il mâchonnait .Il dressa la tête , écouta , pointant les oreilles .Les naseaux dilatés , les lèvres frémissantes découvrant ses dents , l'étalon , de toute sa voix , répondit à l'appel de la manade .
Folco comprit qu'il ne pourrait plus retenir son ami.
Crin-Blanc aimait certainement , lui aussi , ce garçon , sa voix douce et ses caresses .Mais son instinct était le plus fort .Il ne pouvait plus résister au désir de rejoindre ses frères sauvages .
  Le cheval fit un écart pour éviter le tout petit qui était dans ses jambes .Folco n'eut que le temps de se jeter au-devant de lui .Il n'avait rien pour l'arrêter .En entrant dans l'enclos , tout à l'heure , il avait défait la corde passée au cou du cheval.
  Crin-Blanc s'élança contre la barrière qui s'abattit .Puis , ventre à terre , coupant droit à travers la plaine ,        il s'enfuit en direction des hautes terres , les pâturages des fiers chevaux sans maîtres.
Crin-Blanc revenait chez les siens qui vivent libres sous le ciel de Camargue, et se grisent de vent et de vitesse dans leurs courses sans fin .
  Folco perdait son beau cheval.Il avait le coeur lourd .
Crin-Blanc ne pouvait pas vivre chez les hommes .Pas même au côté du garçon qui était son ami .Il lui fallait les grands espaces .
   "Il ne reviendra jamais...."pensa Folco .
Suivi du petiot qui partageait la tristesse du grand frère , Folco rentra dans la cabane pour préparer la marmite oú cuirait la soupe de poisson du dîner .
  "Je m'en occupe ..." dit le grand-père qui tisonnait le feu .
Et il n'ajouta rien .Le vieux pêcheur avait bon coeur .Il voyait que ce soir , son petiot et Folco avaient une grosse peine .


  

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